Notre environnement est menacé par toutes sortes de contaminations. Il est nécessaire de les comprendre afin de pouvoir préserver et restaurer les milieux naturels. C’est le but du dispositif PIVOTS.
16 novembre 2022

PIVOTS est un ensemble unique en France de sept plateformes scientifiques créé en 2016 en région Centre-Val de Loire. Il s’appuie à la fois sur de la recherche en laboratoire et sur des expérimentations sur le terrain pour mieux diagnostiquer et dépolluer notre environnement. Et permettre ainsi de gérer durablement nos ressources naturelles, qu’il s’agisse des sols, du sous-sol, des eaux et de l’air.

PRIME : Plateforme pour la remédiation et l’innovation au service de la métrologie environnementale

C'est quoi PRIME ? PRIME, c'est un laboratoire d’essais novateur pour la dépollution des sols et des eaux ! Découvrez comment il peut vous aider dans le développement de vos procédés. Car avec près de 9000 sites pollués par des métaux lourds (plomb, cuivre, chrome…), des hydrocarbures, ou des composés organochlorés (pesticides, solvants…) en France, PRIME se place comme un chaînon intermédiaire entre le laboratoire et le site contaminé. Il permet de développer, qualifier et valider, à différentes échelles les outils, modèles et procédés nécessaires pour identifier les pollutions, prédire leur impact potentiel et y remédier de façon innovante et respectueuse de l'environnement.

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O-ZNS : l'observatoire des transferts dans la zone non saturée

La nappe phréatique de Beauce, réserve d’eau potable la plus étendue en France, est soumise à une forte pollution relative aux activités humaines et matérialisée par des teneurs élevées en nitrates et pesticides encore retrouvées de nos jours dans les eaux souterraines. La plateforme Pivots O-ZNS, aux dimensions exceptionnelles (20m de profondeur et 4m de diamètre), a pour objectif de comprendre comment et à quelle vitesse l’eau et les contaminants s’écoulent depuis la surface du sol jusqu’à la nappe.

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Les nappes phréatiques sont nos réserves d'eau potable. Elles sont pourtant souvent contaminées. Par exemple, par des nitrates, principalement d'origine agricole, et les polluants émergents tels que les perturbateurs endocriniens. Aujourd'hui, on connaît encore mal les mécanismes qui se déroulent sous nos pieds, c'est-à-dire les processus de transfert de l'eau en sous-sol jusqu'à la nappe phréatique, et notamment le comportement et le devenir des éléments que l'eau véhicule avec elle. Pour répondre à ces problématiques, l'Institut des sciences de la terre d'Orléans a lancé le programme O-ZNS : Observatoire de la zone non-saturée. L'O-ZNS est un projet qui s'insère dans un programme régional qui s'appelle Pivots. Et il vise à comprendre le devenir des polluants agricoles, notamment les nitrates et tous les autres polluants. Et aussi, surtout, les polluants émergents et les perturbateurs endocriniens. Ce projet de recherche vise à identifier comment ces polluants traversent la zone non-saturée depuis la surface jusqu'à la nappe phréatique. La zone non-saturée contient de l'eau et de l'air, et c'est là que les polluants sont susceptibles de se transformer. Le transfert des polluants est soumis aux interactions, notamment avec l'eau, les gaz et les minéraux. Les racines et les micro-organismes jouent aussi un rôle important dans le devenir des polluants agricoles. O-ZNS va permettre d'avoir des données qui nous aident à mieux faire, mieux agir, et de soulager nos nappes phréatiques par rapport à cette pression de changement climatique et de l'impact de l'humain. Et ça, ça permet d'accélérer ou d'aider à mieux réussir la transition écologique. Et d'avoir une agriculture durable qui répond aux besoins de la préservation de la qualité de nos ressources en eau, et de la qualité des produits agricoles. C'est d'abord un travail de terrain pour l'équipe d'O-ZNS. Celle-ci s'est installée sur une parcelle agricole en Beauce pour mener les recherches. On a installé des capteurs pour acquérir des données et développer des bases de données sur plusieurs années, de façon à ce qu'on puisse tester les modèles, nourrir les modèles numériques et prédire ce qui va arriver selon les pratiques agricoles et selon la pression anthropique, donc de l'humain, de façon à ce qu'on ait des jumeaux numériques vers la fin. Tout simplement, on reproduit le maximum de ce qu'on sait sur un objet de façon à ce qu'on puisse repérer ce qui est essentiel dans son fonctionnement. C'est vraiment fondamental pour la gestion de nos aquifères et de nos ressources en eau. Et après, ces données peuvent servir aussi pour d'autres équipes de recherche, mais aussi des publications scientifiques pour qu'elles soient évaluées par nos pairs. O-ZNS s'est doté d'un outil de grande envergure et unique en Europe avec la construction en 2021 d'un puits d'accès en zone non-saturée. Ses dimensions exceptionnelles de 20 m de profondeur et 4 m de diamètre sont un grand défi technologique et scientifique dédiées aux objectifs d'O-ZNS. Il s'agissait de perturber le moins possible l'environnement durant sa réalisation. À terme, la phase d'instrumentation de ce dispositif commencera et il s'agira d'aller installer sur l'ensemble de la profondeur de la zone non-saturée des capteurs innovants en perçant les parois du puits. Ces capteurs vont permettre d'accéder à plusieurs paramètres qui régissent les transferts de masse et de chaleur au sein de la ZNS. Donc on pourra avoir par exemple des sondes qui vont nous donner des informations sur la teneur, donc les quantités d'eau dans les matériaux. Ou également des dispositifs qui vont nous permettre de récupérer des fluides, de l'eau ou des gaz, qui circulent dans la ZNS. L'application du puits est principalement agricole. Son instrumentation et toutes les études qu'on va faire serviront à mieux comprendre le temps que va mettre un polluant agricole pour passer de la surface du sol jusqu'à la nappe, vu que c'est une information qui est encore mal connue. On a installé des capteurs et on va continuer à le faire aussi pour l'enseignement et former les ingénieurs de demain, qui s'approprieront ces connaissances et ces méthodos de gestion des ressources en eau.

DECAP : détecter et éliminer les micropolluants dans les eaux

DECAP, plateforme du programme PIVOTS en région Centre-Val de Loire, élabore des capteurs pour détecter ces micropolluants et dépolluer.

On rejette dans l’eau un grand nombre de molécules chimiques (pesticides, résidus médicamenteux, produits ménagers...). 

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Pesticides, médicaments, métaux lourds, produits ménagers, l'activité humaine génère un grand nombre de substances chimiques dans l'environnement, notamment dans les eaux. Or, ces polluants ne sont pas toujours traités correctement dans les stations d'épuration. Ils sont présents en trop faibles quantités pour être traités par les méthodes traditionnelles.

Il faut savoir que, dans l'eau, à l'échelle de très faibles concentrations, on a un grand nombre de micropolluants qu'il va falloir détecter parce qu'ils peuvent être dangereux, même à ces faibles concentrations. Pour les détecter, il va falloir développer des capteurs pour chacun des micropolluants. Il est nécessaire de les traiter. Donc, de développer des procédés de dépollution.

Détecter et traiter ces micropolluants, c'est l'objectif de Decap, une plate-forme qui fait partie du programme Pivots, un ensemble unique de 7 plates-formes scientifiques consacrées à la préservation de l'environnement. Pivots est situé en région Centre-Val-de-Loire. Les laboratoires Decap se concentrent sur une dizaine de substances particulièrement présentes dans la région. L'objectif est de trouver des solutions peu onéreuses et applicables de façon industrielle.

Si on présente un capteur trop cher, mais qui détecte tout, ça n'a pas d'intérêt. Aucun industriel ne voudra le produire. Le but est d'avoir des capteurs de faible coût, qui puissent être produits à grande échelle pour être déployés à grande échelle. On crée nos capteurs en partant de rien. On travaille sur le matériau. Principalement des capteurs à base de carbone. Pourquoi ? Pour une question de coût. Ensuite, on travaille sur la modification de surface. On va fonctionnaliser nos capteurs pour qu'ils détectent certains polluants.

La surface du capteur est greffée : on y implante des groupements chimiques qui vont reconnaître et capter le polluant ciblé par la mesure. Ce greffage va permettre de rendre le capteur sensible, car on concentre le polluant à la surface du capteur, mais aussi sélectif, puisque ne sera détecté que le polluant clé correspondant à la serrure.

On va placer nos capteurs dans les cours d'eau de manière à avoir, à terme, un réseau de capteurs intelligents sur l'ensemble des cours d'eau afin de pouvoir proposer une détection en temps réel avec un seul opérateur qui gère l'ensemble et, en cas de pollution, qui déclenche les mesures nécessaires à arrêter la pollution du cours d'eau, par exemple.

Une fois détecté, il faut aussi dépolluer. C'est l'autre activité de Decap.

On élabore des procédés d'oxydation avancée, qui permettent de créer des espèces qui vont réagir efficacement avec les micropolluants. On va générer des radicaux hydroxyles, les radicaux OH, qui vont être plus réactifs avec les micropolluants que le chlore, que l'on trouve de façon traditionnelle pour les procédés de nettoyage ou de dégradation. On va coupler les procédés à l'ICMN et au GREMI afin de trouver les meilleurs procédés très efficaces pour traiter les micropolluants et être capable de générer des espèces qui ne seront pas toxiques en aval et qui pourront être traités dans les stations d'épuration conventionnelles.

Les chercheurs de la plateforme Decap continuent à développer de nouvelles techniques pour élaborer des capteurs plus performants et pouvoir détecter de nouvelles substances.

PRAT : impact des polluants gazeux et particulaires sur la santé, le climat et l’environnement

La plateforme PRAT (plateforme réactivité atmosphérique), gérée par le CNRS et l’Université d’Orléans, étudie l’impact de ces pollutions sur la santé, le climat et l’environnement. 

Depuis plusieurs décennies des changements inquiétants de la composition chimique de l’atmosphère sont observés. Ceux-ci, liés pour une grande part à l’activité humaine, peuvent entraîner des pollutions ou nuisances pour l’homme et son environnement voire des modifications du climat. 

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La pollution de l'air est, selon l'Organisation mondiale de la santé, responsable d'1,3 million de morts par an. C'est un véritable fléau sanitaire qui a par ailleurs également un impact environnemental grave, puisque responsable de l'augmentation des gaz à effet de serre et du réchauffement climatique global, sans parler de son coût sur l'économie mondiale. Industrie, transport, chauffage, agriculture, les sources de pollution de l'air extérieur et intérieur sont multiples et c'est ce qui rend ses effets compliqués à étudier.

Il y a différents types de polluants. Il y a des polluants gazeux, qui sont quasiment invisibles, pour la plupart. Et puis il y a des polluants particulaires. Les particules sont tellement légères, quelques micromètres, qu'elles sont en suspension dans l'air, soulevées par le vent et la chaleur émanant du sol. Ces particules peuvent atteindre les poumons si elles sont très fines, jusque dans les alvéoles. Et on a aussi, comme je disais, la pollution gazeuse, les composés organiques volatiles, le monoxyde de carbone, le dioxyde de souffre, les oxydes d'azote.

La région Centre-Val de Loire s'est dotée, via le programme d'études environnementales PIVOTS, d'une plateforme appelée PRAT, qui analyse les substances polluantes dans l'air et leurs évolutions.

PRAT, c'est la plateforme réactivité atmosphérique du projet PIVOTS, qui est constitué d'équipes de recherches du CNRS et de l'université d'Orléans. Son objectif, c'est d'étudier la pollution atmosphérique en alliant de la recherche fondamentale et appliquée. Sur PRAT, nous avons deux outils principaux complémentaires nous permettant de faire des mesures de terrain et de laboratoire. Pour les mesures de terrain, on a le super site qu'on appelle Voltaire, qui permet de suivre, pour certains, en continu, les polluants de l'agglomération d'Orléans. Nous avons aussi une grande chambre de simulation atmosphérique, irradiée par le soleil, qu'on appelle HELIOS. Cette chambre, c'est une bulle transparente qui est située sur le toit du laboratoire. Elle permet de simuler ce qui se passe dans l'atmosphère mais dans des conditions contrôlées, mais réalistes aussi, puisque de par sa taille, son envergure, et de par le fait qu'elle est irradiée directement par le soleil, on se rapproche au plus près de ce qui se passe dans l'atmosphère.

La bulle est remplie d'air purifié aux conditions de température et de pression de l'atmosphère. Les chercheurs y introduisent ensuite un polluant gazeux ou de particules en suspension. Ce polluant va réagir avec les substances chimiques de l'atmosphère mais aussi être irradié par les rayons du soleil. L'analyse des résultats dans le laboratoire sous la bulle permet de déterminer à quelle vitesse le polluant a disparu et comment il s'est transformé. On parle alors de polluant secondaire. On peut ainsi évaluer l'impact du polluant secondaire sur la santé ou sur le dérèglement climatique par exemple.

C'est un outil exceptionnel. Il y en a peu dans le monde. C'est le 3e de cette envergure en Europe, la seule en France. Elle est dotée d'un parc analytique très important, avec des instruments uniques et rares dans le monde. Uniques, parce que certains sont développés par le CNRS, donc cette dimension unique, fait qu'HELIOS accueille des chercheurs du monde entier. PIVOTS nous a permis d'acquérir de nouveaux instruments, qui nous ont permis de caractériser plus finement ce qui se passe dans l'atmosphère, le suivi des polluants. Ces résultats alimentent des bases de données internationales, qui pourront ensuite servir à la modélisation de l'atmosphère et par exemple à la modélisation du changement climatique.