Dans un contexte de hausse du niveau marin, il est devenu nécessaire d’identifier les aquifères côtiers de Basse-Normandie les plus vulnérables aux intrusions salines. Ce phénomène a en effet des conséquences sur les usages de l'eau (alimentation en eau potable, agricole, industriel) et sur les milieux naturels.
29 octobre 2019
Carte de la vulnérabilité des aquifères côtiers aux intrusions salines à l’horizon 2100 de Normandie Occidentale

Carte de la vulnérabilité des aquifères côtiers aux intrusions salines à l’horizon 2100 de Normandie Occidentale. 

© BRGM 

Le besoin 

La façade maritime de l’ex Basse-Normandie présente des profils variés de baies, falaises et côtes rocheuses sur environ 450 km, en lien avec la géologie variée des départements de la Manche et du Calvados. Les usages et besoins en eau sur ces côtes étant nombreux (agricoles, urbains et touristiques, industriels), face à la hausse du niveau marin, il est primordial d’évaluer la sensibilité des aquifères côtiers aux intrusions salines. Ce phénomène, se manifestant par un biseau qui plonge sous la nappe d'eau douce, dépend de plusieurs facteurs (nature des aquifères et hauteur d’eau douce au-dessus du niveau de la mer notamment) et peut être amplifié par des prélèvements d'eau souterraine, ou encore par une élévation du niveau marin et une baisse de la recharge des nappes dans un contexte de changement global. Une remontée océanique de deux mètres pourrait ainsi déplacer le biseau salé de plusieurs dizaines à plusieurs centaines de mètres à l'intérieur des terres. 

Il était donc nécessaire, d'une part, de caractériser les paramètres qui vont influer sur l'intensité du phénomène et d'autre part, de définir les secteurs les plus vulnérables pour proposer une stratégie adaptée dans les secteurs à enjeux en Normandie occidentale. Cette connaissance répond en outre aux exigences de la directive cadre européenne sur l'eau (DCE), selon laquelle les eaux souterraines ne doivent présenter aucune intrusion saline pour être déclarées en bon état. 

Les résultats 

De la conchyliculture à la production d'eau potable, tous les acteurs concernés par l'intrusion saline ont été associés à cette étude du littoral bas-normand, notamment pour réaliser une synthèse des données existantes. Les travaux se sont basés sur : 

  • L’exploitation des données d'observation disponibles, comme les teneurs en chlorure pour les forages situés dans les nappes impactées, 
  • L’utilisation d'un modèle de calcul hydrodynamique développé sur la plaine de Caen, la zone du Bessin et le bassin de la Dives et prise en compte du risque de submersion marine liée au changement climatique, 
  • Le développement d’une méthode d’analyse multicritères couplant des données sur la conductivité hydraulique, l’épaisseur de la zone saturée et l’épaisseur de la nappe au-dessus du niveau de la mer. 

Le modèle hydrodynamique, avec ici une résolution au kilomètre carré, a permis d'estimer les flux d'eau entrant et sortant sur le littoral et de réaliser des simulations en faisant varier les données de prélèvement et les projections climatiques afin d’aboutir à une cartographie des secteurs potentiellement sensibles et à des recommandations pour la mise en place de dispositifs de suivi des intrusions salines. Une carte de vulnérabilité des aquifères côtiers aux intrusions salines a ainsi été publiée en 2017. Dans l’ensemble, les aquifères des vallées côtières ainsi que la Baie du Mont Saint Michel, la quasi-totalité du littoral non rocheux de la Manche, l’Isthme du Cotentin et la vallée de l’Orne et de la Dives y apparaissent tous en forte vulnérabilité. 

L’utilisation 

Suite à cette étude, la DREAL Normandie a mis en œuvre un programme de travail en partenariat avec l’Université de Rennes pour développer les outils de caractérisation et de suivi du processus sur des sites pilotes. L’objectif est de pouvoir disposer, à l’avenir, pour les secteurs les plus sensibles, d’outils opérationnels d’aide à la décision permettant aux acteurs locaux d’anticiper, de gérer ou de s’adapter aux effets des intrusions salines sur les hydro-systèmes littoraux. 

Il est prévu qu’une étude similaire soit menée sur la Normandie orientale avec notamment un focus important sur l’estuaire de la Seine. 

Les partenaires 

  • Agence de l’eau Seine-Normandie 
  • Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) de Normandie