Pour aider à lutter contre les filières illégales de production d'or en Guyane, le BRGM a mis au point une méthode qui, en permettant d'établir la "carte d'identité" physico-chimique de chaque échantillon, permet de localiser sa provenance géographique et de déterminer son mode de production.
28 juin 2016
Observation au microscope de la forme, de la couleur, des inclusions minérales des échantillons d'or guyanais

Observation au microscope de la forme, de la couleur, des inclusions minérales des échantillons d'or guyanais. Les différentes méthodes employées permettent d'établir la carte d'identité physico-chimique de chaque échantillon. 

© BRGM - Pierre Vassal 

En Guyane, l'orpaillage illégal est un véritable fléau, écologique et humain. Le mode de production par amalgame au moyen de mercure, utilisé par les producteurs illégaux, est en effet source de pollutions majeures de la forêt et des eaux, et la concurrence à laquelle se livrent les près de 10 000 "garimpeiros", souvent travailleurs clandestins issus des pays voisins, engendre des violences récurrentes. 

On estime à environ dix tonnes la production illégale annuelle d'or en Guyane, contre une à deux tonnes pour la filière officielle.

Mais comment tarir cette économie parallèle qui compte des centaines de petites unités de production (204 sites clandestins identifiés en 2015, dans le cadre de l'opération militaire de lutte contre l'orpaillage illégal "Harpie") ? 

Le projet européen Tao (Traçabilité analytique de l'or en Guyane), conduit avec l'ONG WWF, a permis d'envisager une solution de lutte qui consiste à tracer l'or qui arrive sur le marché, pour identifier son mode de production mais également son origine géographique, en remontant jusqu'aux caractéristiques minéralogiques et chimiques propres à chaque gisement.

Échantillon montrant une morphologie en "chou-fleur" caractéristique de l’or ayant été amalgamé au mercure

Échantillon montrant une morphologie en "chou-fleur" caractéristique de l’or ayant été amalgamé au mercure. 

© BRGM 

Une palette de méthodes complémentaires 

Le travail conduit en Guyane est une première. Les recherches ont mobilisé un ensemble de techniques d'investigations physico-chimiques, à partir de trente échantillons issus de sept gisements connus en Guyane, et de quatre échantillons provenant du Suriname voisin, produits par amalgame au mercure. 

Les partenaires du projet se sont intéressés aux caractéristiques morphologiques et chimiques des grains, en recourant à une palette de méthodes, depuis l’observation microscopique de leur forme, de leur couleur et des inclusions minérales qu'ils comportent, jusqu'à des analyses isotopiques, qui nous ont chacune apporté des indices complémentaires. Ces recherches ont permis d'établir la carte d'identité physico-chimique de chaque échantillon, véritable "signature" de la zone d'activité minière d'où ils provenaient.

La méthode a aussi débouché sur une caractérisation du mode de production des échantillons, enjeu majeur dans la lutte contre l'orpaillage clandestin. 

Selon qu'ils sont de provenance primaire, alluvionnaire ou amalgamés, les grains d'or n'ont pas la même forme. Proches de leur source primaire, ils conservent des faces relativement planes et l’empreinte des minéraux associés. Transportés par un cours d'eau, ils s'arrondissent. Et en cas de recours à un procédé d'amalgame avec du mercure, ils présentent, du fait de la violence de la réaction chimique, des bordures caractéristiques, en forme de chou-fleur.

Le travail n'en est qu'à ses débuts, et les méthodes devront encore s'affiner. Mais il est particulièrement prometteur et pourrait déboucher, dans les années qui viennent, sur la création en Guyane d'une banque d'échantillons de référence. Avec pour conséquence une sécurisation de la filière légale grâce, notamment, à une meilleure garantie d'origine et une réelle traçabilité des produits commercialisés.

Échantillons d'or guyanais étudiés

Échantillons d'or guyanais étudiés. 

© BRGM